Les poètes Français traduit en Hongrois. Linda et Tebinfea-Francia költök magyarra fordított

Français poètes. Francia költők.

mardi 20 septembre 2011

Chant de l'horizon en Champagne

Chant de l'horizon en Champagne

Voici le tétin rose de l'euphorbe verruquée

Voici le nez des soldats invisibles

Moi l'horizon invisible je chante

Que les civils et les femmes écoutent ces chansons

Et voici d'abord la cantilène du brancardier blessé



Le sol est blanc la nuit l'azure

Saigne la crucifixion

Tandis que saigne la blessure

Du soldat de Promission



Un chien jappait l'obus miaule

La lueur muette a jailli

À savoir si la guerre est drôle

Les masques n'ont pas tressailli



Mais quel fou rire sous le masque

Blancheur éternelle d'ici

Où la colombe porte un casque

Et l'acier s'envole aussi



Je suis seul sur le champ de bataille

Je suis la tranchée blanche le bois vert et roux

L'obus miaule

Je te tuerai

Animez-vous fantassins à passepoil jaune

Grands artilleurs roux comme des taupes

Bleu-de-roi comme les golfes méditerranéens

Veloutés de toutes les nuances du velours

Ou mauves encore ou bleu-horizon comme les autres

Ou déteints

Venez le pot en tête

Debout fusée éclairante

Danse grenadier en agitant tes pommes de pin

Alidades des triangles de visée pointez-vous sur les lueurs

Creusez des trous enfants de 20 ans creusez des trous

Sculptez les profondeurs

Envolez-vous essaims des avions blonds ainsi que les avettes

Moi l'horizon je fais la roue comme un grand Paon

Écoutez renaître les oracles qui avaient cessé

Le grand Pan est ressuscité

Champagne viril qui émoustille la Champagne

Hommes faits jeunes gens

Caméléon des autos-canons

Et vous classe 16

Craquements des arrivées ou bien floraison blanche dans les cieux

J'était content pourtant ça brulait la paupière

Les officiers captifs voulaient cacher leurs noms

Œil du Breton blessé couché sur la civière

Et qui criait aux morts aux sapins aux canons

Priez pour moi Bon Dieu je suis le pauvre Pierre



Boyaux et rumeur du canon

Sur cette mer aux blanches vagues

Fou stoïque comme Zénon

Pilote du cœur tu zigzagues



Petites forêts de sapins

La nichée attend la becquée

Pointe-t-il des nez de lapins

Comme l'euphorbe verruquée



Ainsi que l'euphorbe d'ici

Le soleil à peine boutonne

Je l'adore comme un Parsi

Ce tout petit soleil d'automne



Un fantassin presque un enfant

Bleu comme le jour qui s'écoule

Beau comme mon cœur triomphant

Disait en mettant sa cagoule



Tandis que nous n'y sommes pas

Que de filles deviennent belles

Voici l'hiver et pas à pas

Leur beauté s'éloignera d'elles



Ô Lueurs soudaines des tirs

Cette beauté que j'imagine

Faute d'avoir des souvenirs

Tire de vous son origine



Car elle n'est rien que l'ardeur

De la bataille violente

Et de la terrible lueur

Il s'est fait une muse ardente



Il regarde longtemps l'horizon

Couteaux tonneaux d'eaux

Des lanternes allumées se sont croisées

Moi l'horizon je combattrai pour la victoire



Je suis l'invisible qui ne peut disparaître

Je suis comme l'onde

Allons ouvrez les écluses que je me précipite et renverse tout


Guillaume Apollinaire

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